Quand la caille voit ses petits en danger…
Voici quelques années, alors que je chassais dans un chaume de blé vers la fin du mois de septembre, mes deux setters sont tombés à l’arrêt. L’arrêt s’est prolongé quelques instants, puis soudain une caille s’est levée, tentant vainement de prendre son envol au nez des chiens. Une de mes chienne se met aussitôt en devoir d’attraper l’oiseau visiblement blessé. De petits bonds en petits bonds, voici la caille qui s’éloigne, ratée chaque fois d’un cheveu par ma chienne.
Je pose alors mon fusil au sol, et je tente à mon tour de me saisir de l’oiseau qui s’est blotti sous une touffe d’herbe.
A ma grande surprise, la caille, revigorée, fait alors une superbe envolée de plus de trois cent mètres! J’ai bien tenté de ramasser mon fusil en catastrophe, mais mes trois coups sont restés vains (heureusement d’ailleurs)…
J’ai alors réalisé, qu’à l’instar de la perdrix de La Fontaine il s’agissait d’une ruse, très probablement pour protéger une couvée de cailleteaux située à proximité.
Cela correspond exactement aux vers de Jean de la Fontaine:
« Quand la perdrix
Voit ses petits
En danger et n’ayant qu’une plume nouvelle
Qui ne peut fuir encor par les airs le trépas,
Elle fait la blessée, et va traînant de l’aile,
Attirant le chasseur et le chien sur ses pas,
Détourne le danger, sauve ainsi sa famille,
Et puis, quand le chasseur croit que son chien la pille,
Elle dit adieu, prend sa volée, et rit
De l’homme qui, confus, des yeux en vain la suit. »
(Discours à Mme de la Sabliere, « les fables de la Fontaine », Livre X, fable 1).
Le dévouement de la caille pour ses petits est un fait connu, et raconté à plusieurs reprises dans la littérature. Paul Vialard dans la nouvelle « La caille », Tourgueniev dans une nouvelle tirée de ses souvenirs d’enfance, également intitulée « la caille », racontent tous deux le courage dont les mères savent faire preuve pour sauver leurs petits, allant parfois jusqu’au sacrifice.
Un tres bel article publié dans la revue « Au bord de l’eau, plaine et bois » (décembre 1955) livre un témoignage rare qui montre cet instinct de défense des petits.
» (…) La caille est très attachée à ses petits, et son instinct maternel la porte à s’offrir en proie au chien ou au chasseur pour essayer de sauver sa progéniture. on connait le vol court et bruyant de la caille, lorsque sous l’arrêt du chien, elle est obligée d’abandonner ses petits. Mais peu de chasseurs ont vu la façon dont elle les assemble avant de les laisser seuls. Mon chien arrêta un jour, dans un pré très ras où la mère avait conduite en quête de nourriture, une couvée entière de treize petites cailles nées six ou sept jours auparavant. Dès la première alarme, la mère, gonflant ses plumes et gloussant, se mit à tourner autour de sa nichée, mais sans perdre de vue le chien. Les petits accoururent rapidement près d’elle, et elle les amena auprès d’une touffe d’herbe plus épaisse; à l’aide de son bec, elle les rassembla et les disposa en forme de poire, avec les têtes toutes unies et les postérieurs en cercle. Après quoi elle s’en alla en piétant, obligeant le chien à la suivre, avant de prendre son vol sur une courte distance. J’ai vérifié deux fois le fait, la mère se comportant chaque fois de la même façon.
Phénomène étrange: alors que le chien sent la caille, même très petite, il ne la sent plus quand elle fait partie de la formation en forme de poire dont il vient d’être question. (…) »
Faut il voir dans cette formation « en poire » une preuve du phénomène de rétention d’odeur? Ce comportement montre bien que, malgré sa petite taille, cet oiseau à un comportement beaucoup plus complexe qu’il n’y parait, et est capable de beaucoup de ruse, surtout lorsqu’il s’agit de protéger ses petits…
bjr
j’ai remarqué aussi ce phénomène chez la perdrix gambra
cordialement
J’aurais souhaité que la chasse de la caille des blés puisse également avoir lieu avec des springers.
A ma connaissance, rien n’empêche dans la loi de chasser la caille avec des springers. Ou avez vous entendu parler d’une interdiction?