Voici un ancien appeau à caille, destiné à reproduite le cri de la femelle. Il date très probablement de la première moitié du 20eme siècle, ou de la toute fin du 19eme siècle. Ce dernier à été fabriqué de façon totalement artisanale et se compose d’une bourse en cuir, remplie de crin. Il est doté d’un embout en os. Traditionnellement, les os utilisés pour les embouts des appeaux à caille sont le plus souvent des os de lapins, lièvres, ou même parfois de chats.
Ce type d’appeau était autrefois principalement utilisé pour la chasse au filet (hallier). Il s’agissait de contrefaire au moyen de l’appeau le cri d’une caille femelle, et d’attirer ainsi les mâles dans le filet.
La fabrication de ce type d’appeaux est ancienne, et est restée probablement inchangée durant plusieurs siècles. On remarquera que Diderot mentionnait déjà les détails de sa fabrication dans son encyclopédie à la fin du 18eme siècle:
« L’appeau de la caille est fait d’une petite bourse de cuir pleine de crin, à laquelle on ajuste un sifflet fait d’un os de jambe de chat, de cuisse d’oie, d’aile de héron, etc… qu’on rend sonore avec un peu de cire molle »
La chasse au moyen d’un appeau et d’un hallier demande à la fois doigté et expérience. Cette dernière est évoquée par René Primevère Lesson dans son « Manuel d’ornithologie domestique ou guide de l’amateur des oiseaux de volière », Roret, publié en 1834:
« Voici maintenant comme se fait cette chasse. Dès qu’on entend chanter un mâle de caille que l’on veut prendre, il faut s’avancer doucement près de lui à la distance tout au plus de cinquante pas: on place alors un filet parmi le blé, de façon cependant qu’il puisse bien poser sur la terre, sans quoi l’oiseau passerait dessous et s’échapperait, après quoi on se retire quelques pas en arrière. La caille chante-telle? on donne de son côté deux ou trois coups de l’appeau, de manière que, lorsque la caille se tait, l’appeau ne fasse entendre qu’un ou deux tons, précisément comme la femelle. Il faut au surplus, avoir soin de ne pas faire trop d’appels, des sons faux ou inégaux; car dès que l’oiseau s’aperçoit de la supercherie, il s’éloigne aussitôt ou garde le silence, et ne retombe plus dans pareil panneau. C’est une chose surprenante de voir comment la caille va toujours directement à l’appeau, et sait si bien le trouver que si par hasard elle passe sous le filet, elle approche assez du chasseur pour qu’il puisse la prendre avec la main ; dans le cas où l’on s’aperçoit qu’elle est passée à côté du filet ou dessous ; il faut se rendre doucement du côté opposé, et lui répondre à l’ordinaire avec l’appeau; on peut encore ainsi la tromper. Il y a des cailles qui savent fort bien éviter le filet, surtout lorsqu’il est placé dans un lieu trop dégagé et trop éclairé; il est bon dans ces circonstances, de former des angles aux deux bouts dans lesquels, quand elle voudra en faire le tour, elle s’embarrassera facilement. »
A noter que ce type de chasse à été interdit, tout du moins officiellement, à la suite de la signature par la France de la convention internationale du 19/03/1902 (décret d’application du 12/12/1905).
Gravure attribuée à Joseph Stradanus (Bruges, 1523 – Florence, 1605)et extraite de l’ouvrage ‘Venationes ferarum, auium, piscium. Pugnae bestiariorum: et mutuae bestiarum », vers 1578. Elle représente une scène de chasse à la caille au moyen de filets et d’appeaux.
Plus curieux, l’appeau peut également être utilisé pour la chasse au chien d’arrêt comme le raconte G.Dolbeau dans un article publié en juillet 1960 dans le mensuel « Au bord de l’eau, plaine et bois ».
« M’arrêtant autant que possible face au vent s’il se faisait sentir, je glissais deux cartouches à charge réduite (…) dans mon calibre 16, que je plaçais sur le bras gauche, et sortait de ma poche un appeau que je disposais à plat dans la main gauche, la partie métallique sortant entre l’index et le majeur. De la main droite je frappais avec l’index et le majeur la bourse de l’appeau à petits coups saccadés, imitant ainsi le chant de la caille: coc co loc, coc co loc… La réponse ne se faisait pas attendre, et mon chien qui l’avait entendue et y était habitué se dirigeait immédiatement vers le lieu d’où elle venait. Calmement, la tête assez haute, le cou tendu, fléchissant sur ses membres, le corps rasant la végétation, il avançait par saccades, s’arrêtant, repartant, frétillant de plus en plus vite du moignon qui lui servait de queue. Ayant remis mon appeau en poche, je le suivais pas pas, le fusil prêt; quelquefois la caille s’envolait brusquement à quelques mètres du chien, mais le plus souvent ce dernier marquait l’arrêt ferme, immobile, une patte levée; la caille alors partait, rasant le sol, elle n’avait pas fait 15 mètres que, la couvrant bien, je la tirais. »
Cette chasse appartient t’elle au passé? Rien de moins sûr.
Si les appeaux en cuir et en os ne sont désormais plus que des objets de collection, ils ont été avantageusement remplacés.
J’ai souvent été intrigué, et cela depuis plusieurs années, par l’important nombre de CD, mais aussi d’appeaux électroniques reproduisant le cri de la caille (ce sont de petits appareil munis d’un haut parleur, sur lesquels sont enregistrés le chant de l’oiseau) en vente dans certains pays comme l’Italie. Malgré le fait que leur utilisation à la chasse soit formellement proscrite, l’article de Mr Dolbeau permet tout à fait d’imaginer quelle pourrait être leur utilisation…
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