La caille joue un rôle important dans la mythologie indienne et est mentionnée à plusieurs reprises dans le Rigveda, le plus ancien texte hindou, composé près de 2000 ans avant notre ère. Le loup dévoreur Vikra (la nuit), absorbe la lumière symbolisée par la caille (Vartikâ). C’est seulement lorsque la caille est libérée par les jumeaux divins (les Açvins) que le jour peut renaître. La libération de la caille symboliserait donc la libération de l’aurore, arrachée de la gueule des ténèbres (1). Le mot védique signifiant caille (Vartikâ) peut être traduit littéralement par « celle qui revient ». C’est une allusion évidente au cycle de migration de la caille (cette dernière part à l’automne pour revenir au printemps, période ou l’allongement des jours marque le retour de la lumière solaire), et expliquerait que cette dernière ait finalement été assimilée à l’aurore.
La caille est également mentionnée dans la célèbre épopée indienne le « Mahâbârata » (rédigée vers le IVeme siècle Av JC) sous une forme étrange: une caille monstrueuse apparaisant aux côtés du soleil. Dotée d’un seul œil, et d’une seule aile, cette dernière cracherait du sang.
La caille est également présente dans la mythologie des phéniciens: Melqart, fils de Baal et d’Astéria (Astarté), était le dieu distributeur de toutes les richesses, et le « patron » de la ville de Tyr.
Le dieu phénicien Melqart
Dieu de l’industrie et de la navigation, son culte fut propagé par les phéniciens dans toutes leurs colonies. Ce dernier présidait au mouvement du soleil et au retour des saisons, et était également le dieu du printemps. Pour cette raison, on lui sacrifiait des cailles, symbole solaire de renouveau (elle représentaient le retour du printemps).
Melqart sera assimilé plus tard à l’Héraclès des Grecs et à l’hercule des Romains, bien que ce dernier soit beaucoup plus ancien.
Une légende rapporte que Melqart (qui deviendra Héraclès chez les grecs) fut tué au cours d’un voyage en Libye par Typhon, et qu’il fut ramené à la vie par Iole (Iolaos) après que ce dernier ait passé une caille sous son nez (Athénée, Banquet des Sophistes, IX, 47)…
La caille est également un oiseau présent dans la mythologie grecque.
Astérie, une des filles du Titan Coéos, se transforma en caille pour échapper aux avances de Zeus, le roi des dieux, qui s’était lancé à sa poursuite sous la forme d’un aigle. Elle finit par se jeter dans la mer pour lui échapper. A l’endroit ou cette dernière était tombée, se forma une île portant son nom: Astérie.
Astérie se transformant en caille afin d’échapper à Zeus (l’aigle)
Par la suite, cette île prendra son nom actuel: Délos. L’histoire ne se termine pas la toutefois…
Zeus parvint à séduire une autre des filles du Titan Coéos et de Phoebé, la belle Léto. Une version affirme que pour parvenir à ses fins, Zeus aurait changé Léto en caille, avant de se transformer lui même en cet oiseau.
Héra, l’épouse jalouse de Zeus, apprenant que les enfants de Léto et de Zeus seraient d’un rang plus important que les siens, décréta que ces derniers ne pourraient pas naître dans un lieu ou le soleil brillait. Elle entreprit également de séquestrer Ilithyie (la déesse des naissances) pour l’empêcher d’accoucher. Héra envoya également le monstrueux serpent Python afin de lui interdire l’accès de toutes les terres.
Afin de protéger Léto, Zeus fut contraint de la transformer en caille. Aussitôt, Héra interdit aux cailles d’atterrir sur terre. Zeus chargea alors Borée (le vent) de transporter Léto jusqu’à Ortygie (Littéralement: « l’île aux cailles », c’est à dire Délos). Délos était alors une île flottante non arrimée, entre la mer et le ciel, et échappait ainsi à l’interdiction d’Héra. Alors que Léto volait désemparée au dessus de la mer, L’île déserte et stérile de Délos prit pitié d’elle, et accepta de la recevoir. En contrepartie l’île fit promettre à Léto que pour échapper à la colère d’Héra, elle serait entièrement consacrée à son futur fils Apollon, et que l’on y bâtirait un temple dédié à ce dernier.
Poséidon, dieu de la mer, envoya alors une vague afin de former une voûte au dessus de l’île, et abriter cette dernière du soleil. Zeus redonna ensuite sa forme humaine à Léto. Cette dernière ne parvenait cependant toujours pas à accoucher, du fait qu’Héra persistait à séquestrer Ilithye, la déesse des naissances. Iris, messagère des dieux, parvint néanmoins à corrompre Ilithye pour que cette dernière délivre Léto, cela à l’insu d’Héra.
Accouchement de Léto
Léto put enfin accoucher d’Artémis au pied d’un palmier. A peine née, Artémis aida sa mère à accoucher de son frère jumeau Apollon. Après la naissance des jumeaux, Poséidon fixera définitivement l’île au fond de la mer au moyen de quatre piliers.
L’atterrissage de Léto, transformée en caille, sur l’île de Délos, ne doit rien au hasard. Délos (surnommée aussi Ortygia, littéralement « l’île aux cailles ») est réputée pour être un lieu de passage de l’espèce à l’époque de la migration. Le fait que Léto ait été transportée par Borée (le vent) fait aussi clairement référence à la façon de migrer des cailles. Les cailles ne sont pas de très bons voiliers et utilisent les courants aériens, qui leur permettent de franchir la méditerranée. Malgré cela, les oiseaux, épuisés par ces vols, sont obligés de faire étape. Cela explique que fréquemment, des vols entier de cailles s’abattent sur les différents îlots méditerranéens. Cette migration jouait un rôle économique important pour les populations locales qui capturaient en grand nombre les oiseaux épuisés par leur traversée de la méditerranée (pratique qui se poursuivra jusqu’au 19eme siècle).
Suite à cette légende, Léto restera étroitement associée à l’oiseau, comme l’atteste cette citation d’Aristophane (« Les oiseaux », paragraphe 851-902):« Salut encore (…) à Léto, mère des cailles ».
En échange de l’aide accordée lors de l’accouchement de Léto, Artémis obtint de son père Zeus de pouvoir aider les femmes à accoucher. Choquée par cette expérience, elle obtint également de rester vierge.
statue d’Artemis
Artémis vit à l’écart des mortels, éternellement jeune et vierge, en compagnie des Oréades (Nymphes de Montagnes). Elle est la déesse de la chasse, maîtresse des animaux et de la Lune. Munie de son arc, cette dernière chasse les animaux sauvages. En raison de son lieu de naissance (l’île aux cailles), Artémis est associée à cet oiseau.
On retrouve également la caille dans la mythologie Romaine.
La caille, selon le dictionnaire des antiquités grecques et romaines fait partie des oiseaux aux mœurs lascives (tout comme la perdrix), et est consacrée à Vénus, la déesse de l’amour.
La légende raconte que la déesse proposa même un jour aux cailles l’honneur de tirer son char. Mais les cailles, en raison de leur grande paresse, déclinèrent finalement cet honneur…
Ces oiseaux figurent sur certaines des représentions de la déesse. Les cailles étaient offertes en présent par les amants et avaient une signification amoureuse.
(1) R.Christinger, Asiatische Studien/Etudes asiatiques 1-4, 1963 : pp.125-133,Genève.
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