Un oiseau délicat à plumer

15 juin 2007 at 8 h 15 min

Les chasseurs qui ont déjà tué quelques cailles, et qui ont eu à les plumer, savent d’expérience que ce genre de travail n’est pas toujours aisé, surtout lorsque les cailles sont bien grasses. Plumer un de ces oiseaux requiert délicatesse et attention…
Charles Diguet recommande notamment de « Plumer la caille avec grand soin, de peur de la déchirer ». Eugene Louis Blanchet ajoute : «Vous la plumerez ou la ferez plumer par des doigts délicats, en faisant attention, car la peau fine et grasse se déchire sous la traction de plusieurs plumes tirées à contre sens. »
Pour Charles Jobey, c’est un travail délicat, qui ne peut être donné qu’à une personne de confiance : « En rentrant de la chasse, allez tout droit offrir vos cailles aux dames de la maison, et priez-les de vouloir bien les plumer elles-mêmes, – gardez-vous bien de laisser ce soin à une maritorne ! Elle serait capable de tout salir et déchirer. Plumer la caille est un travail de femme, tout aussi délicat que celui de la broderie, et beaucoup plus utile que de faire des trous dans de beau linge neuf. ».
Une fois notre oiseau plumé, il reste souvent encore de petites plumes, pas toujours très faciles à enlever. Il est alors tentant, de passer les cailles à la flamme afin de finir de les éliminer, cela donnant une impression de plus grande netteté. C’est une erreur, car cela à pour effet de brûler les graisses superficielles de l’oiseau, et d’altérer une partie de sa saveur. Il faut donc s’armer de patience, et plumer notre caille jusqu’au bout….

Le coturnisme (ou la revanche des cailles?)

15 juin 2007 at 8 h 10 min

Le coturnisme est un empoisonnement provoqué par l’ingestion de chair de caille sauvages (caille des blés). Il se manifeste par les symptômes suivants: Faiblesse généralisée, fièvre, extinction de la voix, douleurs musculaires, paralysie des membres inférieurs, vomissement, décoloration des urines, gastro entérites sèvères. Des troubles cardiaques, ou des insuffisances rénales, peuvent également survenir et provoquer la mort dans certains cas.
Les symptômes surviennent dans un délai d’une heure et demie à 10 heure après la consommation des oiseaux, et persistent généralement un à deux jours (jusque 10 jours dans certains cas extrêmes).

Les cas de coturnisme ont été principalement constatés dans les régions suivantes: le nord de l’Algérie (mais aussi l’Afrique du Nord), le sud de la France, la Grèce, la péninsule su Sinaï, le sud-ouest de l’ex URSS, et le nord-est de la Turquie.
Phénomène curieux: les cas d’empoisonnement constatés en Algérie et en France sont survenus à la suite de la consommation de cailles en train d’effectuer leur migration vers le nord, au printemps. Aucun empoisonnement ne semble être survenu pendant la migration retour de l’automne (période ou les cailles sont traditionnellement chassées en France, et ou on peut donc les consommer sans danger).
Au contraire, en Grèce et dans le sud ouest de la Russie, les cas d’empoisonnement ont été constatés lors de la migration d’automne.
Ces empoisonnements sont d’autant plus étranges que rien ne permet de différencier les oiseaux sains des oiseaux porteurs des toxines, et qu’au cours d’un même repas, certaines personnes s’empoisonnent tandis que d’autres sont indemnes.

Ce type d’empoisonnement est connu depuis l’antiquité. La bible fait en effet référence dès le 7eme siècle avant JC (livre des Nombres 11, 31) à des empoisonnement par ingestion de cailles (voir article « Ancien testament: deux passages tirés de l’exode et du livre des nombre », rubrique bibliographie).

Stenay Abraham7a

Les hébreux frappés par la colère divine après leurs excès.

Certains auteurs de l’antiquité, comme Pline l’ancien, ont expliqué ces empoisonnements par le fait que les cailles ingèrent en quantité des graines de cigüe (voir article « Pline l’ancien, Histoire Naturelle », dans la rubrique bibliographie), ou certains insectes toxiques.
La grande cigüe (Conium Maculatum) est une plante herbacée bisannuelle de la famille des apiacées.
Elle pousse à l’état sauvage dans les régions tempérées de l’Eurasie, en Afrique du Nord et dans le sous-continent indien.
Toutes les parties de la plante sont toxiques. Cependant, ce sont les fruits verts qui contiennent la plus grande concentration d’alcaloïdes (et notamment la conine). La cigüe servait dans la Grèce antique à l’exécution des condamnés à mort (Socrate fut condamné à boire une potion fabriquée à base de cette plante).

Grande cigüe

Grande cigüe

Des recherches ont été conduites en 1947 sur ce sujet par le Docteur Edmond Sergent, Directeur de L’institut Pasteur d’Alger.
Ce dernier à gavé pendant plusieurs jours des cailles sauvages avec des graines de cigües fraiches, préalablement broyées. Les oiseaux n’ont manifesté aucun signes d’intoxication. Tuées quelques jours après, les cailles ont été vidées et servies légèrement rôties à des chiens. Ces derniers ont manifesté entre 2 et 4 heures après le repas des signes d’intoxication (perte d’équilibre, parésie pattes postérieures). Le Dr Sergent remarque cependant que l’intoxication ne se produit que lorsque les chiens consomment des oiseaux nourris avec des graines fraiches. Aucun symptômes n’apparait lorsqu’ils consomment des cailles nourries avec des graines de cigüe récoltées et séchées depuis plusieurs mois.

De nouvelles recherches, menées en 1980 (Kennedy, Louis Grivetti EL. Toxic quail: a cultural-etiological investigation of coturnism. Ecol Food Nutr 1980;9:15-42.) ont semblé remettre en question la piste de la cigüe. Lors de nouvelles expériences, il est apparu que les oiseaux nourris avec des graines de cigüe, ou des insectes toxiques, succombaient peu après. On remarquera cependant qu’elles ont été menées sur des cailles japonaises, et non pas sur des cailles des blés (comme l’avait fait le Dr Sergent).
Il est donc possible que la caille des blés ait développé au fil du temps une résistance aux graines de cigüe, contrairement aux cailles japonaises (la cigüe ne figure pas dans l’aire de répartition naturelle de cet oiseau).

Fait plus troublant, les scientifiques ont constaté que dans certaines zones géographiques ou les empoisonnements sont survenus, la grande cigüe, dont les graines sont présumées responsables des intoxications, n’est pas toujours présente.
Les graines d’une autre plante, de la famille des menthes, l’épiaire annuelle (Stachys annua) pourraient être en cause. Ces dernières ont été retrouvées par des chercheurs russes dans les intestins de plusieurs cailles ayant directement provoqué des empoisonnements.

Epiaire annuelle (stachys annua)

Epiaire annuelle

Photo publiée avec l’aimable autorisation du site: http://perso.orange.fr/erick.dronnet/index.htm
Aucune étude complète n’ayant encore été réalisée sur le sujet, le coturnisme reste donc une forme d’empoisonnement mystérieuse, et encore aujourd’hui partiellement inexpliquée.

Ouverture 2007: premières impressions

8 juin 2007 at 21 h 35 min

Les anglais ont leur « Glorious twelve » (12 août) pour l’ouverture de la grouse. Plus modestement, j’ai mon dernier week-end d’août avec l’ouverture anticipée de la caille, que je ne raterais pour rien au monde…
Je suis arrivé par train tard dans la nuit afin d’être au rendez vous. Juste le temps de préparer mon fusil et quelques cartouches avant de me coucher. La nuit est courte…
De bonne heure le lendemain je me rends dans un grand chaume situé à quelques centaines de mètres de chez moi avec deux de mes setters anglais.
En route, j’observe les champs alentours. Les chaumes sont particulièrement rares cette année, et je constate avec tristesse que de nombreux agriculteurs ont mis à profit les dernières pluies pour les broyer.
Honneur aux anciens: May à droit au premier tour. Les cailles du matin dans la rosée ne tiennent pas toujours bien l’arrêt, et il faudra toute l’expérience de mon vieux setter et ses arrêts de marbre si je veux prendre quelques photos.
Je me dirige directement vers la bordure au fond du champ que je sais être la plus favorable.
Il est sept heures: les herbes sont encore envahies de rosée, et je regarde le soleil monter doucement derrière la colline. Quand je tourne la tête, May est déjà à l’arrêt. Il est immobile à cinquante mètres de moi, à demi couché dans le chaume herbeux et je sais déjà à son attitude que la caille est tapie à un mètre à peine de lui.

premier arrêt saison 2007 sur cailles

Je souris en pensant: « Elles sont la! ». Je m’avance vers lui, puis je passe doucement devant le chien. Une caille fait un magnifique départ enroulé à un mètre de moi, et s’enfuit à tire d’aile vers le tournesol voisin. Je la salue en vain de trois salves. Je grimace un peu: pas en forme ce matin! Mauvais présage?
Quelques coups de feu commencent à éclater dans la campagne, signal que l’ouverture est bien lancée. May insiste sur la bordure. Un groupe de quatre cailles se lèvent hors de portée au seul bruit du chien et se remisent dans le tournesol. Dommage!
La rosée rend le travail difficile par endroit. May ralentit un peu et m’indique la présence d’oiseaux sans trop savoir ou ces derniers se trouvent. Une caille décolle. J’épaule, je tire… Elle plonge à la limite à du champ, tuée net. Je la ramasse et je constate qu’il s’agit d’un magnifique petit mâle. Ma première caille de la saison…

Photo caille

Sans s’attarder sur ce premier succès, le chien repart immédiatement. Il continue d’insister et multiplie les passages, ratissant conscienscieusement l’étroite bordure. Quelques instants après May se fige une nouvelle fois à l’arrêt.

2eme arrêt de May

Deux cailles giclent brusquement et partent dans des directions opposées. Mon premier tir fauche immédiatement la première. J’ai le temps de me retourner et d’abattre la seconde dans la foulée. Je fonce la ramasser tandis que May me rapporte impeccablement le premier oiseau: Il est en effet très facile d’égarer les oiseaux blessés ou morts.
Encore deux petits mâles! Cela va mieux… Un peu rassuré par ce doublé je poursuis ma route.
Sur le coup de huit heures, des petits groupes de chasseurs arrivent d’un peu partout dans la campagne. Cinq, six voitures fourgonnette passent l’une derrière l’autre devant le chaume. Leurs conducteurs sont des chasseurs et je vois ces derniers ralentir et scruter les chaumes. Fini la tranquillité! Deux groupes de trois chasseurs, sans doute attirés par le bruit de mes tirs, rentrent dans le chaume que j’occupe et je comprend vite qu’il me sera difficile de continuer à chasser dans ces conditions. Je traverse la route pour me rendre au chaume voisin espérant un peu plus de calme. Je remarque à l’angle d’un tournesol un grand tapis d’herbes qui semblent être un terrain favorable. J’y engage May qui tombe immédiatement à l’arrêt.

Arrêt à l'orée d'un champ de tournesol

Après être resté immobile quelques secondes, le chien commence à couler rapidement en direction du champ voisin. Je réalise que la caille à déja pièté en direction du tournesol encore sur pieds et s’y est mise à l’abri. Inutile de l’y poursuivre.
D’autres chasseurs continuent à arriver d’un peu partout et les deux ou trois chaumes attenants sont littéralement envahis. Cela devient une vraie foire d’empoigne! Il est vrai qu’il reste tellement peu de chaumes intacts. Ces derniers se sont rabattus par dépit sur les quelques champs restants. Leur nombre sur une si petite surface commence à friser le ridicule…
Je bat en retraite vers mon véhicule pour y ramener May.
Au tour du plus jeune, Aslan. Le jeune setter entreprend d’un galop souple et rasant d’explorer le grand chaume ou je suis revenu. Dans la campagne, les coups de fusils se sont tus. Beaucoup de chasseurs découragés par le petit nombre de cailles et les rares chaumes disponibles rebroussent chemin et remontent dans leurs véhicules aussi rapidement qu’ils étaient venus. Le calme revient progressivement…
Malgré ses efforts Aslan ne parviendra qu’à mettre à l’envol une caille dont il n’avait pas su deviner la présence. Dommage pour ce jeune chien! J’avais espéré le mettre en présence de davantages d’oiseaux. Il y aura d’autres occasions dans la saison… Il est déjà neuf heures et la chaleur monte progressivement. C’est à mon tour de partir.
Tandis que je range mon fusil dans ma voiture, mes impressions sont mitigées. C’est une « petite » ouverture, et il est évident que les oiseaux seront plus rares cette année. En 2006 j’avais prélevé neuf oiseaux (et levé plus du double) lors de ma première sortie dans ce même chaume. Peut être les passages à venir seront ils meilleurs? Je rentre néanmoins heureux d’avoir vu voler huit ou neuf oiseaux, avec quelques beaux arrêts à la clef.

Concours cailles sauvages ANCC 2014

3 avril 2007 at 10 h 00 min

Cette année encore l’Association Nationale des Chasseurs de Cailles organise un concours amateur sur cailles sauvages. Ce dernier se déroulera le samedi 19/07/2014 sur les communes de Belpech, Molandier (11) Mazeres et Gaudies (09).

affiche concours ancc 2014

Les bulletins d’engagement sont disponibles en téléchargement sur le blog de l’association:
http://chasseur-de-cailles.blog.fr/2014/04/03/concours-cailles-sauvages-ancc-18136147/

Premières arrivées

1 avril 2007 at 21 h 36 min

L’air s’est radouci depuis quelques jours et semble annoncer le printemps. J’ai deviné leur présence. Elles sont sûrement la, quelque part, invisibles, dans les blés encore verts. Enfin de retour de leur long périple africain.
Ce n’est que quelques jours plus tard, vers le soir, alors que me promenais dans le fond du jardin, que j’ai enfin eu confirmation de mes soupçons. J’ai entendu une caille chanter timidement. Au fil des minutes, l’oiseau s’est enhardi. Guidé par son chant, j’ai marché vers la friche voisine. Je me suis approché, tout doucement, presque sur la pointe des pieds, avec le secret espoir d’apercevoir le mâle debout parmi les herbes, en train de pousser son cri d’amour. Mais l’oiseau s’est brusquement tu. Un peu à regrets, je me suis alors éloigné.
Lors du dîner sur la terrasse, j’aurais beau essayer par moments de tendre l’oreille: ce soir la, je n’entendrais pas la caille chanter de nouveau.

Les jours ont passé. Je profite d’une belle après midi ensoleillée, en ce début de mois de mai, pour faire une ballade avec un de mes setters. Après avoir fait un rapide crochet dans le pré voisin, je traverse la route pour entrer dans une ancienne friche, littéralement envahie de trèfles en fleurs. L’air est doux. Je surveille du coin de l’oeil Aslan mon jeune mâle qui entreprend de déployer sa quête, sans doute à la recherche d’un couple de perdreaux.

caille dans les herbes

Tout à mes pensées, je sursaute brusquement en entendant un bruissement d’ailes. Deux magnifiques cailles viennent de se lever simultanément, presque sous mes pieds. A peine dérangées, ces dernières volent sur une cinquantaine de mètres, en décrivant un léger arc de cercle, et se reposent à la limite d’un fossé.
L’occasion est trop belle. Je siffle mon jeune mâle, qui revient au galop. Je tends le bras en direction de l’endroit ou les cailles se sont posées, afin d’orienter sa quête. Va-t-il retrouver la piste des oiseaux, qui viennent à peine de poser?
Aslan s’élance aussitôt, et balaie la zone en quelques lacets. Arrivé à la limite du champ, ce dernier ralentit brusquement, avant de prendre une jolie pose d’arrêt, subjugué par l’émanation. Il coule à présent par petite saccades, et je devine à son attitude que les cailles ont entrepris de tracer des lacets parmi les grandes herbes, afin d’égarer leur piste. Je souris en le voyant, nez collé au sol, essayant de démêler l’écheveau. La pose semble peu académique pour un setter anglais, et ferait sans doute frémir plus d’un juge de field trial.
Avec autorité, le chien se dégage et reprend sa quête. Il saute le petit fossé pour entrer dans le champ voisin, un chaume laissé sur pied dans lequel les herbes commencent à pousser.
Je songe un instant à le rappeler : Il se trompe ! Les cailles sont de ce côté ci du fossé, je les ai vues !

Aslan a l'arret sur une caille

Mais Aslan semble sûr de lui. Il parcourt quelques mètres à peine, et se fige à l’arrêt. Cette fois, il les a bloquées. L’arrêt est tendu, et seule la queue semble parcourue d’un léger frémissement.
Je franchis la séparation entre les deux champs, et je m’avance vers le chien. Les diablesses ! Après avoir essayé de semer le chien, elles ont sauté le fossé. Où sont elles ?
La réponse est instantanée: les deux cailles giclent brusquement à deux mètres du chien, et s’envolent à tire d’aile.
Un jeune couple qui s’apprête probablement à nicher. Je rappelle aussitôt Aslan, parti à leur poursuite. L’exercice a été concluant, mais je ne veux pas déranger davantage les oiseaux.
Je repars en direction de la ferme, profitant des dernières minutes de la ballade, tandis que le chien quête au loin.
C’est à ce moment précis qu’une énorme caille -presque une demi perdrix- part dans mes pieds. Je la poursuis du regard tandis qu’elle s’envole en direction d’un blé vert. Une belle caille adulte, comme les deux autres, peut être déjà en train de pondre. La rencontre de trois oiseaux en quelques minutes, sur une si petite parcelle, me parait de bon augure. Et je songe en m’éloignant que le printemps, cette année, semble décidément plein de promesses.

Apparition de l’espèce

14 mars 2007 at 11 h 45 min

Les paléontologues situent l’apparition des oiseaux modernes il y a 56 millions d’années, durant la période de l’éocène. On sait notamment que c’est à ce moment là que sont apparues de multiples espèces comme l’aigle, le pélican, le vautour… et la caille.

Et en ce qui concerne la France ? Les paléontologues disposent d’informations, notamment grâce à des fouilles menées dans les Pyrénées françaises (1). Les restes osseux recueillis dans les différents gisements étudiés ont permis d’identifier 170 espèces d’oiseaux, déjà présents au quaternaire. La présence d’ossements de cailles a été constatée sur quinze des sites étudiés, ce qui semble montrer que l’espèce était déjà bien établie à l’époque dans notre pays. On sait également, grâce à d’autres fouilles, que les hommes préhistoriques n’hésitaient pas à inscrire les cailles à leur menu.
On peut s’interroger sur le biotope originel des cailles à cette époque. Certaines espèces de céréales, comme le blé, n’existaient à l’état sauvage qu’au moyen orient, dans ce que l’on a appelé le croissant fertile. Les céréales ne sont véritablement apparues en Europe qu’à la période du néolithique, il y a tout juste 10000 ans. On peut donc supposer que les cailles vivaient à l’origine dans les prairies naturelles. L’homme a considérablement favorisé par la suite l’essor de l’espèce, en développant massivement la culture du blé en Europe.

(1) Inventaire systématique des oiseaux quaternaire des Pyrénées françaises, André Clot et Cécile Mourer Chauvire, 1986

Etymologie

14 mars 2007 at 11 h 30 min

Le mot caille est un nom féminin formé au 12eme siècle. Il serait dérivé du bas latin médiéval: Quaccola (ou quaquila). Le terme est d’origine onomatopéique: il a été formé d’après la nature du cri de l’oiseau, qu’il est censé reproduire.
Il est intéressant de remarquer que son appellation anglaise (« Quail ») dérive elle même même du vieux français « Quaille ».

gravure caille grand format

Du fait de son aire de répartition étendue, on retrouve la caille (Coturnix Coturnix Coturnix) dans de nombreux pays.
Malgré des noms d’apparence très différentes selon les différents pays et langues, beaucoup sont des onomatopées qui essaient de reproduire le cri de l’oiseau.
Voici quelques uns des différents noms de notre oiseau: Quaglia en Italie, Codorniz en Espagne et au Portugal, Wachtel en allemand, Vaktel en suédois et norvégien, Viiriäinen en Finnois, Перепел (Perepel)en russe, Kornhæna en Islandais, przepiórka en Polonais, ヨアロッパウズラ (yo-roppauzura) en Japonais, Prepeliţă en Roumain, Fürj en Hongrois, Ορτύκι (Ortiki) en Grec moderne…
Un site (the world bird database) s’est fait une spécialité de rassembler les différents noms(et parfois surnoms)des oiseaux selon les pays. On trouve également certaines langues régionales (breton, basque, catalan etc..)
Vous trouverez sur le lien suivant le mot caille traduit en 75 langues:
http://avibase.bsc-eoc.org/species.jsp?lang=FR&avibaseid=14A931F1DBCA97FF

Quelques ouvrages sur le sujet….

14 mars 2007 at 10 h 56 min

Aucun ouvrage n’a jamais été écrit, à ma connaissance, sur le seul thème de la caille des blés ou de sa chasse (si l’on excepte, bien entendu, les manuels dédiés à l’élevage de la sous espèce Japonaise, ou les thèses scientifiques, souvent ciblées sur un aspect particulier de l’oiseau). Les textes eux même sont rares et éparpillés: quelques pages, un article, un chapitre, placés au milieu d’un ouvrage cynégétique, souvent ancien…
J’ai donc pensé que pour plus de facilité, il pouvait s’avérer utile de les rassembler au sein d’une même rubrique.
Ces textes s’étalent sur une période allant de l’antiquité jusqu’à nos jours. Beaucoup de ces écrivains, chasseurs, naturalistes d’un autre temps, nous livrent leurs anecdotes, conseils, observations, qui restent assez souvent d’actualité. Tout cela sent le vécu, et l’on comprend en les lisant qu’ils ont beaucoup observé, et parfois même chassé ce gibier, encore abondant à cette époque en France et en Europe.

J’ai essayé, lorsque cela était possible, de joindre l’intégralité du texte, ou du chapitre, et de le rendre disponible en téléchargement, de façon à créer une mini bibliothèque en ligne. Certains de ses ouvrages sont en effet coûteux, ou difficiles à trouver. J’espère que vous aurez du plaisir à les lire, ou à les relire avec moi…

caille miniature

L’ancien testament: deux passages tirés de l’exode et du livre des nombres

14 mars 2007 at 10 h 55 min

Un des plus anciens témoignages écrit concernant la caille des blés, si ce n’est le plus ancien, est incontestablement la bible elle même (on estime que les passages les plus anciens ont été rédigés vers le 8ème siècle avant JC).
Les cailles sont évoquées à deux reprises dans un épisode de l’ancien testament.
Dans ce célèbre passage extrait de l’exode (16-13), le peuple juif effectue la traversée du désert, qui dure près de 40 ans, guidé par Moïse. Six semaines après son départ, le peuple est affamé et commence à murmurer contre Moïse et Dieu en raison du manque d’approvisionnement.
« L’Éternel, s’adressant à Moïse, dit : J’ai entendu les murmures des enfants d’Israël. Dis-leur: Entre les deux soirs vous mangerez de la viande, et au matin vous vous rassasierez de pain; et vous saurez que je suis l’Éternel, votre Dieu. Le soir, il survint des cailles qui couvrirent le camp; et, au matin, il y eut une couche de rosée autour du camp. Quand cette rosée fut dissipée, il y avait à la surface du désert quelque chose de menu comme des grains, quelque chose de menu comme la gelée blanche sur la terre. »

Bible Luther , les cailles et la manne

Bible Luther , détail montrant l'arrivée des cailles

Arrivée des cailles et de la manne sur le camp des juifs. Gravure sur bois extraite de l’édition originale de la bible de Luther (1534)

La zone ou le peuple hébreu se trouvait correspond effectivement à l’un des grands axe de migration de l’espèce qui la traverse deux fois par an.
Il faut cependant bien distinguer la manne céleste (le pain), envoyée sous forme de rosée (elle est décrite dans la bible comme ressemblant à de la graine de coriandre, et s’adaptant au goût de chacun), de l’envoi du vol de caille (la viande) sur le peuple hébreu. C’est la manne céleste, conservée dans des jarres, qui servira de nourriture aux hébreux durant les 40 ans de la traversée du désert.

Les cailles sont de nouveau évoquées dans un autre des livres de l’ancien testament racontant la traversée du désert du peuple juif, le livre des Nombres 11, 31.
Un an après le peuple Hébreu se trouve dans les environs de Qivroth-Taawa, dans le désert du Sinaï (sensiblement la même zone que lors du premier épisode). De nouveau le peuple se plaint et réclame de la viande à Moïse. Dieu fait alors pleuvoir une nouvelle fois des cailles sur le camp des juifs. Ces derniers se jettent sur les oiseaux et se livrent à des excès de nourriture. Mis en colère par ce spectacle, Dieu fait mourir en grand nombre les juifs qui se sont livrés à ces excès :
« L’Éternel fit souffler de la mer un vent, qui amena des cailles, et les répandit sur le camp, environ une journée de chemin d’un côté et environ une journée de chemin de l’autre côté, autour du camp. Il y en avait près de deux coudées au-dessus de la surface de la terre.
Pendant tout ce jour et toute la nuit, et pendant toute la journée du lendemain, le peuple se leva et ramassa les cailles ; celui qui en avait ramassé le moins en avait dix homers. Ils les étendirent pour eux autour du camp. Comme la chair était encore entre leurs dents sans être mâchée, la colère de l’éternel s’enflamma contre le peuple, et l’éternel frappa le peuple d’une très grande plaie. On donna à ce lieu le nom de Kibroth Hattaava, parce qu’on y enterra le peuple que la convoitise avait saisi. »

Planche couleur extraite du chapitre 11 du livre des nombres, bible mortier (1700)

Ces deux épisodes auraient eu lieu à un an d’intervalle, vers la mi avril, au moment ou les cailles migrent vers le nord.
Beaucoup d’auteurs ont traduit et interprété le texte ci dessus, en prenant pour hypothèse qu’il décrivait les quantités de cailles tombées sur le sol.
Guebwiller, auteur de « la bible déchiffrée », à estimé que les quantités de cailles prélevées par famille (10 homers) supposeraient que 9 millions d’oiseaux aient été abattus.
Robert Flament-Hennebique, dans « le Poil de la bête » s’est également livré à cet amusant calcul. Sachant qu’un homer à une contenance de 363 litres et que la population totale des juifs lors de l’exode correspond à deux millions de personnes environ, si l’on suit la bible à la lettre, il parvient à un total de 7 milliards de litres de cailles. Il conclut avec humour qu’à raison de 7 ou 8 cailles au litre, cela correspond à l’ensemble des cailles de la planète.
Les deux estimations sont évidemment totalement invraisemblable. Même s’il y a très probablement quelques éléments de vérité dans le récit biblique, ses auteurs avaient sans doute plus à coeur de frapper l’imaginaire des lecteurs que de livrer un récit historique exact.
Peut-être faut-il entendre, comme Guebwiller le suggère, que la hauteur de deux coudées n’indique pas les cailles tombées sur le sol, mais plutôt la hauteur à laquelle ces dernières survolaient le camp.
Plusieurs autres points du texte semblent en revanche tout à fait plausibles. Le fait que le vent se soit levé au moment de l’arrivée des cailles correspond tout à fait à leur façon naturelle de se déplacer. Les courants aériens aident considérablement les cailles à parcourir de grandes distances pendant leur migration: Le fait de planer à pour effet de réduire considérablement les efforts fournis par les oiseaux pour se maintenir en vol. Il est également fréquent que surprises par un vent contraire, ces dernières s’abattent en masse. Les oiseaux épuisés, et incapable de reprendre leur envol, peuvent alors être facilement capturés à la main. Les vols sont souvent espacés de deux jours, temps de repos nécessaire aux cailles avant de repartir. Ce dernier point recoupe tout à fait le récit biblique qui mentionne la capture de cailles pendant deux journées.
Le fait que les hébreux disposent les oiseaux tout autour du camp correspond à la façon égyptienne de préparer les oiseaux. Après avoir vidés et nettoyés ces derniers, ils sont mis à sécher au soleil. Cette coutume égyptienne est rapportée par l’historien grec Hérodote (484-425 avant JC) deux siècles après le récit biblique.
On peut s’interroger sur le fléau qui frappe le peuple Hébreu juste après l’ingestion des cailles. http://www.cailledesbles.fr/pline_l_ancien_l_histoire_naturelle2735612/

Il est très probable que oiseaux aient consommé des graines de ciguë, ce qui expliquerait des malaises, voire des décès par empoisonnement (coturnisme).  http://www.cailledesbles.fr/le_coturnisme_ou_la_revanche_des_cailles3162291/

L’historien Flavius Josephe (37-100 après JC) résume l’ancien testament dans l’un de ses ouvrages « Les antiquités judaïques » (achevé en 94 après JC).

flavius josephe

Flavius Josephe narre à sa façon les deux épisodes de la bible. Revenant sur le premier envoi de cailles, il précise qu’il s’agit d’une espèce très abondante dans le golfe arabique, et que des vols de cailles épuisées s’abattent fréquemment. Cela est dû notamment au fait que ces dernières volent à basse altitude, ce qui est beaucoup plus fatiguant.
(Antiquités judaïques, livre 3, chapitre 1 ; paragraphe 5)
« Dieu promet de prendre soin d’eux et de leur fournir ces ressources tant souhaitées. Moïse, ayant entendu cette réponse de Dieu, retourne auprès du peuple. Ceux-ci, en le voyant tout réjoui des promesses divines, passent de l’abattement à une humeur plus gaie, et lui, debout au milieu d’eux, dit qu’il vient leur apporter de la part de Dieu un secours contre les embarras présents. Et, peu après, une quantité de cailles (cette espèce d’oiseaux abonde, plus que toute autre, dans le golfe Arabique) traverse ce bras de mer et vient voler au-dessus d’eux ; et, fatiguées de voler, habituées, d’ailleurs, plus que les autres oiseaux à raser la terre, elles viennent s’abattre sur les Hébreux. Ceux-ci, les recueillant comme une nourriture préparée par Dieu, soulagent leur faim. Et Moïse adresse des actions de grâce à Dieu pour les avoir secourus si vite et comme il l’avait promis. »

le miracle des cailles

Flavius Josephe évoque également le deuxième envoi d’un vol de cailles sur les juifs, et la punition divine infligée au peuple hébreu pour ses excès de nourriture:
(Livre 1, chapitre 13, 302)
« En même temps qu’il parlait, le camp tout entier se remplit de cailles; on les entoure et on les ramasse. Cependant Dieu, peu après, châtie les Hébreux de l’arrogance injurieuse qu’ils lui avaient témoignée : il en périt, en effet, en assez bon nombre. Et, encore aujourd’hui, cette localité porte le surnom de Kabrôthaba, c’est-à-dire Tombeaux de la concupiscence. »

On peut voir ci dessous un tableau qui illustre la punition du peuple hébreu (les assiettes sont encore pleine de la viande des cailles autour des juifs frappés par la colère de dieu)

Stenay Abraham7a

Aristote, Histoire des animaux

14 mars 2007 at 10 h 55 min

Aristote est un philosophe et savant grec (stagire, 384 av. jc- Chalcis 322 av. jc). Ce dernier est notamment l’auteur, entre autres ouvrages, de « l’Histoire des Animaux ».

Aristote

Cet ouvrage est très important car il sera recopié scrupuleusement pendant des siècles, et enseigné. Il influencera encore largement les auteurs du 19eme siècle.
Aristote n’a pas un discours très structuré, et évoque parfois certains sujets dans le désordre. Aucun chapitre en particulier n’est consacré à l’oiseau, qu’il cite toutefois à plusieurs reprises. Ainsi dans le livre 8, chapitre 14, paragraphe 6, ce dernier écrit que les cailles font partie des espèces les plus fragiles, et que pour cette raison, elles émigrent en premier lorsque le temps est encore clément. Il précise qu’elles « émigrent dans le mois de Boédomion « (entre fin août et début septembre), et constate que ces dernières sont plus grasses à l’automne qu’au printemps.
Au paragraphe 9 et 10 de ce même chapitre, Aristote remarque les difficultés qu’ont les cailles à s’envoler par grand vent, ce qui facilite leur capture par les oiseleurs. A propos du cri de la caille à l’envol, il écrit encore « Et d’ailleurs c’est à cause de l’embarras dû à la grosseur de son corps que l’oiseau jette toujours des cris perçants tout en volant, tant est pénible son travail. »
Ce dernier consacre le paragraphe 11 (livre 8, chap 14) à cet oiseau:
« Quand les cailles viennent de l’étranger elles n’ont aucun chef, mais quand elles émigrent, la glottis partent avec elles, ainsi que la caille royale, et le hibou moyen ducs, et le râle des genêts. Le râle des genêts les appelle la nuit, et quand les oiseleurs entendent le coassement de l’oiseau dans la nuit, ils savent que les cailles sont en mouvement. La caille royale est comme un oiseau de marais, et la glottis à une langue qui peut se projeter hors de son bec. »
Ce passage est un peu mystérieux: il évoque pour la première fois le rôle du râle des genêts en tant que chef de migration des cailles. Pour les autres oiseaux évoqués, cela est plus difficile. Ce dernier semble faire une distinction entre la caille royale et le râle des genêts, ce qui exclut à priori qu’il s’agisse du même oiseau. Peut être s’agit il du turnix, qui possède une certaine ressemblance au niveau du plumage? Quant au glottis, il demeure une énigme, et laisse perplexe plusieurs autres auteurs.
Ce texte est important car c’est lui qui est à la base de la légende, pourtant infondée, du râle des genêts, comme étant « le roi des cailles ». Cette citation sera abondamment reprise et amplifiée par les auteurs du 19eme siècle.
Aristote mentionne également dans le texte les oiseleurs qui semblent piéger cet oiseau. Les grecs pratiquaient largement la chasse de toutes sorte de gibiers aux moyens de filets et de pièges (largement décrit par Xénophon dans « De la chasse »). Ils s’en servaient aussi très probablement pour la capture des cailles .

L’ensemble des textes sont accessibles en ligne à partir du lien ci dessous:
http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/Aristote/animaux8.htm#1411